Expédition Africa : à en perdre le nord dans le sud !
Epilogue :
Nous venons de pointer le dernier poste dans une météo
dantesque, le mauvais temps s’est installé, pluie fine, vent et visibilité
nulle. Les Américains sont maintenant derrière et on a entrevu les lampes des Suédois.
Tout est possible, nous pouvons créer l’exploit sur cette dernière section très
compliquée au niveau de la navigation. Il nous reste à rejoindre l’arrivée. Il
faut remonter au sud la chaîne de montagne puis trouver la petite porte de
sortie au milieu des falaises. Il est 4h du matin, Adrien propose de quitter la
rivière et de grimper sur la crête, une belle trace semble nous emmener au
paradis. Hélas c’est un cul de sac, on tourne en rond, nos boussoles nous
étonnent par les directions proposées et au bout d’1h d’hésitation sans réussir
à retrouver la rivière, nous décidons de poser la tente et d’attendre le jour.
Nous sommes trempés, frigorifiés. Entrer dans cette mini tente à 4 n’est pas
une simple affaire, on se cale comme on peut. L’eau rentre, Sonia grelotte et
Tom décide de faire un 180 au milieu de notre pause ! A 6h30, le jour est
là et la visibilité un poil plus importante. Il nous faut un monstre de courage
pour sortir, remettre nos affaires trempées et froides. Nous transformons nos 2
duvets alupacks en vêtement de survie. Un trou pour la tête, 2 pour les
bras ! Sonia et moi ressemblons à
un bonhomme Michelin. Tom à sa couverture de survie en protection ultime et
Adrien le guerrier se contente de ses micros couches. Nous retrouvons notre
cours d’eau protecteur et remontons sur la bonne crête, le moral revient et
nous pensons que nos adversaires sont dans les mêmes conditions. Il nous faut maintenant trouver la sortie dans
ce chaos de falaise. Nos boussoles deviennent folles, elles n’indiquent pas les
mêmes choses, changent de direction chaque seconde. Nous partons à l’ouest sans
s’en rendre compte et descendons au nord
au lieu du sud. Nos supporters devants leurs écrans doivent devenir
fous ! Tom est très inquiet, Sonia s’accroche mais avec Adrien nous ne trouvons pas la solution. On se
recale sur la crête, nos montres
semblent moins désorientées que nos boussoles et nous indique enfin le bon sud.
Après de nombreuses hésitations, un coup de fil à Stéphan, nous trouvons enfin
une sortie. Nous rentrons à pied le
moral dans les chaussettes, pensons que ce coup de fil nous disqualifie. A
l’approche de l’arrivée et après avoir observé des babouins s’épouiller avec
excitation, Piou nous annonce que toutes les équipes ont utilisé leur téléphone
et que nous sommes toujours dans la course. On sprint comme des fous pour
sauver ce podium très mérité. Nous franchissons cette ligne à 14h en 3ème
position 25’ seulement derrière les américains. Soulagés, fiers, heureux …
Mais avant ça:
Départ : La magie du Drakensberg
Nous sommes libérés de cette longue attente à 6h30 lundi
matin. 3 jours que cette belle montagne du Drakensberg nous tend les bras. On
part vite avec nos amis suédois sur ce long trek de 75km. Quelques équipes
s’accrochent mais nous nous échappons petit à petit avec Silva. Très rapidement
nous nous apercevons qu’ils ont l’intention de rester avec nous toute la
journée. Les mêmes choix et aucune tentative de nous semer au physique !
Les paysages sont grandioses, nous franchissons d’immenses échelles pour
atteindre le plateau à 3000m, nous pointons un Cp en haut de la 2ème
plus haute cascade du monde (980m). Nous évoluons ensuite de longues heures sur ce
no man’s land incroyable. Magique ! La forme est là et le moral au plus
haut. La nuit tombe au moment de la descente et nous pensons aux équipes qui
vont devoir évoluées difficilement de
nuit sur le plateau.
Je tourne avec ma petite caméra des images fabuleuses de
l’intérieur de la course. En bas d’une descente très chaotique, nous pointons
le dernier cp et apprenons que 3
équipes Africaines sont déjà là !
Elles ont emprunté un passage délicat qu’on nous avait clairement déconseillé
au breefing. Une chose est claire maintenant, il va falloir compter avec les
locaux ! Ils jouent à domicile et nous n’avons pas tout à fait les mêmes cartes…en
main !
Section 2 : A l’attaque
Nous faisons une transition express et attaquons cette
courte section vtt en 2ème position. Il fait nuit et Adrien nous
fait son festival habituel en navigation nocturne vtt ! On dépose les
sudaf Cyanosis. On avale les pistes et routes à une vitesse super sonique et
nous terminons cette section en tête avec une petite avance sympathique !
De quoi attaquer l’interminable section canoë plus sereinement…
Section 3 : Baignades diverses
C’est donc déjà le moment d’aller sur cette section de 75km
de rivière et lac. Sonia semble sereine et cela me rassure. Stephan
l’organisateur ancien militaire genre section d’assaut a choisi de placer les
bateaux de l’autre coté de la rivière. Soit on traverse à la nage, soit on fait
un grand grand tour à pied pour l’éviter ! Bon le choix est vite vu, on
nage les 250m. Il fait si froid dehors que l’eau nous parait douce. C’est la
première fois de ma vie que je prends autant de plaisir à nager dans une eau à
18 degrés… Résultats : 1er Tom, 2ème Seb, 3ème
Sonia, 4ème Adrien. La sortie est plus difficile, le froid est vif
et on se change au plus vite auprès du feu proposé par les
« marschals ». Ce sont des jeunes étudiants un peu perdus parfois mais fort sympathiques
embauchés par les organisateurs.
Sonia a enfilé sa tenue de cosmonaute et nous voici lancer
en pleine nuit sur un premier lac. On hésite un peu et on a du mal à
s’orienter. Cyanosis nous double rapidement sur un premier barrage qu’on doit
contourner à pied. Visiblement ils connaissent là encore un passage secret…
Silva revient aussi sur la rivière suivante et nous restons au contact un petit
moment. Mais nos bras sont trop petits
et le froid saisissant. Le lever du jour
ce mardi est très apprécié. La température remonte et nous captons chaque
rayon de soleil avec joie. Encore un barrage à contourner et nous voici à
l’approche d’une zone de rapide annoncée classe 2! Enfin nous allons
prendre de la vitesse et terminer plus vite. Les Sudaf de Merrel nous doublent
à grande allure. Nous passons les 2
premiers rapides avec facilité mais nos
bateaux très chargés sont instables. Puis cela devient du rodéo, on est dans
une zone plutôt classe 3 et 4 !!! On se renverse, on perd le sac de Sonia,
coincé au milieu du rapide. Je tente et réussit une manœuvre osé pour le
récupérer. Ouf ! Sur le rapide suivant, on voit en contre bas les Merrels
en vrac ! On décide de poser Tom et Sonia avec les sacs et on descend avec
Adri seul dans notre bateau. Je me rate et me fait secouer, je termine à la
nage en sautant de bloc en bloc en récupérant au passage bateau pagaie gourde…
Tout sauf ma caméra perdue à jamais avec ses images fabuleuses dans ce rapide
classé 2 par Stéphan !!! Je suis terriblement déçu, ce film de l’intérieur
aurait été fantastique… Autant vous dire que les rapides suivants, on les
contourne en portant les bateaux sur des blocs rocheux énormes. Nous qui
pensions prendre de la vitesse ! Encore 20km de plat, on a plus de bras,
les lacets de cette rivière sont sans fin. On décide de couper le dernier par
une petite bande de terre où l’on croise des zèbres ! Sur le lac final, on voit deux équipes devant
nous et cela nous redonne un peu de force. On termine cette section 4ème mais on a limité la casse… Il
est 15h et on navigue depuis minuit !
Section 4 : Danse avec les
girafes et feu de brousse
Cette longue section de vtt nous fait
passer dans un premier temps dans une réserve. Stéphan nous avait
dit « attention au Rhino » ! On est plutôt content de
retrouver notre vtt, et le moment qu’on va vivre est magique, nous apercevons
très vite des antilopes et des girafes au loin. Puis le Rhinocéros au loin
aussi ouf ! Puis un rapide crochet dans la réserve nous ramène du coté des
girafes. Elles sont à 10m de nous et se mettent à courir. Quelle grâce, on a
l’impression qu’elles sont au ralenti ! Dans la descente qui suit, on est
obligé de freiner pour éviter d’en percuter trois qui nous coupent la route…
Nous vivons un moment unique! Mais il faut bien sortir de la réserve car si le
rhino ne nous a pas mangé, on a décidé nous de manger du Sudaf sur cette
section ! On attaque sur nos supers
vtt Chiru et Cube. Le 29 pouces est idéal sur ce genre de tracé. On dépose très
rapidement Cynaosis le visage toujours aussi sombre puis plus tard les Merrels
qui visiblement ne s’attendaient pas à cela. C’est bon ça ! Au loin nous
apercevons un incendie, un feu de brousse. Bien entendue on doit passer à coté,
trop fort cet organisateur ! La piste longe le feu et le spectacle est étonnant.
2 locaux nous regardent passer. Scène étrange…Nous sommes très en jambe et
Adrien se débrouille comme un chef. On perd 2 fois 20 minutes bêtement sur la
recherche finale de postes mal placés sur la carte. Dommage. On termine sur un
sentier en descente mémorable. C’est la pause de 6h bien méritée 2h environ
derrière Silva ! On nous offre à manger et à boire. Au lit !
Section 5 : Drakensberg bis
Pendant notre pause, les 2 équipes de
Sudaf et les américains de Tecnu sont
arrivés. Ils sont à 1h de nous. A 6h du matin
mercredi, nous nous engageons pour ce 2ème trek annoncé à
55km. On progresse bien sur une longue ascension très verticale. Puis un poste
en aller-retour pour éviter le passage par un pas qui semble très compliqué. On
cherche ce poste un long moment qui n’existe pas car c’est un marschal qui doit
nous pointer. On ne le sait pas et on perd du temps bêtement. Ce dernier ne
sait pas où se positionner. Sur le retour on croise les 3 équipes en chasse.
L’une d’elle a volé les bâtons d’Adrien qu’on avait posés sur le bord, ce qui
le rend furieux et accentue son petit coup de moins bien… Sonia le tracte et
avec Tom on porte son sac à tour de rôle. Les paysages sont toujours sauvages
et grandioses. On redescend vers un semblant de civilisation par un canyon à la
végétation luxuriante. Quel contraste avec le plateau désertique juste
au-dessus ! Encore un moment magique. Nous traversons une sorte de camping qui dispose d’une superette.
On fait le plein de boissons et de chips et on repart pour une nouvelle
ascension sur des chemins qui n’existent pas. Adrien est tellement concentré
sur son ravitaillement qu’il en oublie une 2ème carte qui proposait
un sentier très direct pour monter sur le plateau. 1H de perdue… La nuit tombe
déjà, ce trek est interminable, notre moyenne horaire infime. Sur le plateau,
les frontales de 2 équipes sont visibles proche de nous. Quelle course !
On doit maintenant évoluer de nuit et trouver le départ du canyon qu’on doit
descendre par 5 rappels successifs. C’est délicat mais on s’en sort. Le premier
rappel de 28m est très humide. Ambiance très raid aventure, on est en
autonomie, on doit descendre les blocs humides et trouver nous même les départs
des rappels. Sonia s’en sort très bien et le froid n’est pas trop saisissant. On
sort du canyon, descend le long d’une crête pour chercher une dernière balise
genre chasse au trésor le long d’une rivière. Adrien traverse la rivière
plusieurs fois et après une petit heure de recherche la trouve enfin ! C’est la fin de cette
section d’anthologie où l’on a perdu du temps alors qu’on pouvait creuser
l’écart sur nos poursuivants et revenir sur les Silva. Dommage mais quel
plaisir pour les yeux et les sens.
Section 6 : 145km à vtt, le mano
à mano avec les américains
Après une petite sieste, nous repartons derrière les
américains plus rapide sur la transition. Le tracé est très très roulant. Au
bout d’1h, Adrien après une première hésitation dans une zone très compliquée
fait un choix d’itinéraire magistral qui nous permet d’arriver en contre haut
des américains. On les dépose non sans plaisir et fonçons comme si on faisait
un prologue de 5km. On est toujours aussi bien physiquement et on pense ne plus
les revoir… Mais un américain ne lâche pas l’affaire comme cela ! A
mi-chemin de cette section et après avoir traversés quelques villages de
brousse. Ils reviennent au petit matin de ce jeudi avec puissance face au vent
qui vient de se lever avec vigueur.
Scène étonnante, l’un d’eux a le dossard d’Adrien, il s’est trompé en
partant cette nuit et Adri ne s’en était même pas aperçu ! Nous discutons
un petit moment. Echange sympathique. Puis ils placent une attaque sur la route
afin qu’on ne puisse se protéger du vent derrière eux. S’en suit un mano à mano mémorable durant 5h.
On passe, ils repassent… Nous gagnons d’un poil une longue ascension que nous effectuons en se
tractant les uns les autres, en poussant, portant les vtt. On s’arrête à une
rivière pour boire, eux non et ils terminent la section 5’ devant nous ! Nous
sommes au bord d’un lac, on mange des hamburgers et on prépare le
final !!! Nos caisses vtt ne sont pas là, cela nous donne un bonus temps
pour l’arriver. On en profite pour dormir un petit peu.
Section 7 : Kayak raccourci
Les organisateurs ont eu la bonne idée de raccourcir la
section. De plus à 18h ce jeudi, le vent est tombé. On traverse le lac d’abord
sereinement puis le mauvais temps se lève, vent de face, vague. Je commence à
me demander si on va pouvoir rejoindre le bord. Finalement au bout de 2h de
lutte acharnée, on arrive à la dernière transition. On met du temps avec Sonia
à se réchauffer au bord du feu ridicule…
Section 8 :Drakensberg 1,
orienteurs 0 !
Les suédois sont 3h30 devant et les
américains 1h. La carte est compliquée et on se dit que tout est possible. Le
moral au beau fixe et nous partons pour notre dernière nuit de course. Le
brouillard est épais, la visibilité est très réduite. Très rapidement nous
retrouvons nos nouveaux amis qui sont bien content de se recaler sur nous pour
monter sur une crête. Plus haut on aperçoit des frontales suédoises… Ca sent
bon tout ça. Nous réussissons à nous débarrasser de nos encombrants adversaires
et Adrien nous fait un festival d’orientation de nuit sans visibilité en se
calant sur les cours d’eau. La chance nous sourit aussi car on trouve un chemin
non carté qui nous emmène au poste 50, dernier poste du raid !
La suite vous la connaissez…
Conclusion :
Voilà la magie du raid
expédition. Des sensations fortes, des découvertes magiques, une
aventure collective puissante où l’on se doit de ne faire qu’un pendant 100h ou
plus.
Ce raid confirme je pense notre potentiel dévoilé lors du
dernier raid in France 2012. Ce n’était visiblement pas un coup de chance. Nous
avons encore une marge de progression et de grandes aventures à vivre ensemble.
Adrien, Sonia, Tom, ce fut grandiose, fort, beau, intense… On n’est pas prêt de
l’oublier !
seb
3 Comments:
C'était bien bon ce petit récit, j'étais perdu avec vous dans le froid et la pluie. Vous avez été grands.
A bientôt!
j'attendais ce petit compte rendu avec impatience : mettre des mots et des images sur ce tracé GPS suivi avec émotion, frayeur et impatience pendant 4 longs jours!!!vous avez fait une belle équipe et une belle course; bravo et merci au capitaine...
Thérèse Lhermet
tout simplement énorme ce que vous avez fait...et effectivement à suivre en live, le stress est monté...et avec des décalages d'infos entre la trace GPS et le tableau de bord des CP !
super CR également, on comprend d'autant mieux la perf que les conditions météos n'ont pas été au rdv...
belle équipée :)))))
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